Relation d'équivalence sur un ensemble
Soit $E$ un ensemble.
Etant donnée un sous-ensemble $\mathcal G$ de $E\times E$, on définit la relation $\sim_{\mathcal G}$ (que l'on notera simplement $\sim$) par :
$$x \sim y \Longleftrightarrow (x,y)\in \mathcal G $$
Ainsi nous dirons que $x$ et $y$ sont en relation suivant $\sim$ lorsque le couple $(x,y)$ est un élément de l'ensemble $\mathcal G$.
Exemple 1. Soit $\sim$ la relation sur $\mathbb Z$ définie par
$$x\sim y \Longleftrightarrow \exists k\in \mathbb Z, x-y=2k$$
Cela signifie que $x$ est en relation avec $y$ suivant $\sim$ si $x-y$ est pair. Autrement dit, en notant
$$\mathcal G=\left\{(x,x+2k)\ |\ k\in\mathbb Z \right\} $$
on retrouve bien la définition donnée plus haut.
Exemple 2. Soit $f$ la fonction définie sur $\mathbb R$ par $f(x)=x^2$. Prenons pour $\mathcal G$, le graphe de $f$ :
$$\mathcal G=\left\{(x,y)\in \mathbb R\times \mathbb R\ |\ y=f(x)=x^2 \right\}$$
Ainsi, nous avons par exemple, $2\sim 4$ car $f(2)=4$. Mais nous n'avons pas $4\sim 2$ car $4^2\neq 2$.
Définition. Nous dirons qu'une relation $\sim$ définie sur un ensemble $E$ est une relation d'équivalence si les points suivants sont vérifiés :
(1) Réflexivité : $\forall x\in E$, $x\sim x $
(2) Symétrie : $\forall x,y \in E$, $x\sim y \Longrightarrow y \sim x$
(3) Transitivité : $\forall x,y,z \in E$,
$$\left. \begin{array}{c} x\sim y \\ \textrm{et}\\ y\sim z \end{array} \right\} \Longrightarrow x\sim z $$
Exemple 3. On vérifie sans difficulté que la relation d'égalité $=$ définie sur $\mathbb Z$ est une relation d'équivalence.
En revanche, la relation $\leq$ définie sur $\mathbb Z$ n'est pas une relation d'équivalence car $0\leq 4$, mais $4\leq 0$. Cependant, on a quand même ici la transitivité car $x\leq y$ et $y\leq z$ implique toujours $x\leq z$.
Exemple 1 (suite). En reprenant l'exemple 1, on a une relation d'équivalence sur $\mathbb Z$ :
(1) Réflexivité. Clairement pour tout $x\in \mathbb Z$, $x\sim x$ ($k=0$)
(2) Symétrie. $x\sim y$ implique $x-y=2k$ avec $k\in \mathbb Z$, ainsi $y-x=-2k$ donc $y \sim x$.
(3) Transitivité. $x\sim y$ et $y\sim z$ immpliquent $x=y+2k$ et $y=z+2k'$, avec $k,k'\in\mathbb Z$. On en déduit que $x=z+2(k+k')$ avec $k+k'\in\mathbb Z$. Autrement dit, $x\sim z$.
Exemple 2 (suite). On n'a pas de relation d'équivalence car il n'y a pas de symétrie (ni de réflexivité, ni de transitivité d'ailleurs).
Classes d'équivalence
Etant donnée un ensemble $E$ muni d'une relation d'équivalence $\sim$, nous appelons pour chaque $x$ dans $E$ la classe d'équivalence de $x$ l'ensemble des $y\in E$ tels que $x\sim y$.
Nous noterons $[x]$ la classe d'équivalence de $x$. Autrement dit,
$$[x]=\left\{y\in E\ | \ x\sim y \right\} $$
Propriété 1. Les classes d'équivalence de $E$ sont disjointes et leur réunion est $E$.
On dit dans ce cas que les classes d'équivalence de $E$ forment une partition de $E$.
Autrement dit si $[x]$ et $[y]$ sont deux classes d'équivalences, elles sont confondues ou d'intersection vide.
Démonstration.
(1) Supposons que $z\in [x]\cap [y]$. Il faut montrer que $[x]=[y]$. On utilise la transitivité de $\sim$ à plusieurs reprises.
Soit $t\in[x]$, alors $t\sim x$ et comme $x\sim z$, $t\sim z$. Or $z\sim y$ donc $t\sim y$ et $t\in[y]$. Tout élément de $[x]$ est donc dans $[y]$.
De la même manière tout élément de $[y]$ est dans $[x]$.
On en déduit que $[x]=[y]$
(2) Clairement tout $x\in E$ est un élément de $[x]$ par réflexivité.
Exemple 1 (suite). L'ensemble des classes d'équivalence de l'ensemble $\mathbb Z$ pour la relaion $\sim$ définie par $x\sim y \Longleftrightarrow \exists k\in\mathbb Z, x-y=2k$ est l'ensemble
$$\left\{[0],[1] \right\} $$
$[0]$ est l'ensemble des entiers pairs et $[1]$ est l'ensemble des entiers impairs.
L'ensemble $\mathbb Q$
Partons de la connaissance de l'ensemble des entiers relatifs $\mathbb Z$.
On note $\mathbb Z^\star$ l'ensemble des entiers relatifs non-nuls.
On note $E=\mathbb Z \times \mathbb Z^\star$.
L'ensemble $E$ est composé des couples d'éléments $(a,b)$ d'entiers relatifs avec $b\neq 0$.
Sur $E$, nous allons définir une relation $\sim$ par la règle suivante :
$$(a,b) \sim (a',b') \Longleftrightarrow ab'=a'b $$
Nous allons montrer que $\sim$ est une relation d'équivalence. L'ensemble $\mathbb Q $ sera ensuite défini comme l'ensemble des classes d'équivalence de $E$ pour la relation $\sim$.
Preuve.
(1) Tout d'abord $(a,b)\sim (a,b)$ car $ab=ab$.
(2) Si $(a,b)\sim (a',b')$, alors $ab'=a'b$ et donc $a'b=ab'$ nous donnant $(a',b')\sim (a,b)$.
(3) Supposons que $(a_1,b_1)\sim (a_2,b_2)$ et que $(a_2,b_2)\sim(a_3,b_3)$.
Alors $a_1b_2=a_2b_1$ et $a_2b_3=a_3b_2 $.
On a alors $a_1b_2b_3=a_2b_1b_3=a_3b_2b_1$. Comme $b_2\neq 0$, on en déduit que $a_1b_3=a_3b_1$ ce qui donne $(a_1,b_1)\sim(a_3,b_3)$.
Notation. La classe d'équivalence d'un élément $(a,b)$ de $E$ pour la relation $\sim $ définie plus haut est notée
$$\frac{a}{b}=\left\{(c,d)\in \mathbb Z \times \mathbb Z^\star\ | \ ad=cb \right\} $$
D'après la propriété 1, on a donc
$$\frac{a}{b}=\frac{c}{d} \Longleftrightarrow ad=cb $$
On note $\mathbb Q$ l'ensemble des classes d'équivalence de $E$ pour $\sim$. C'est l'ensemble des nombres rationnels.
Opérations sur $\mathbb Q $, $\mathbb Z \subset Q$
Propriété 2. $\mathbb Z$ s'identifie à un sous-ensemble de $\mathbb Q$. Autremenent dit, il existe une fonction injective $\mathbb Z \longrightarrow \mathbb Q$.
Plus précisément, $\mathbb Z \longrightarrow \mathbb Q$ est donnée par $x\mapsto \frac x 1$.
Démonstration. $\frac x 1=\frac y 1 \Longrightarrow x\times 1= 1\times y \Longrightarrow x= y $. Donc la fonction définie plus haut est bien injective.
La fonction $j:x \longmapsto \frac x 1$ est appelée l'injection naturelle de $\mathbb Z $ dans $\mathbb Q$.
On identifie alors sans problème l'ensemble $\mathbb Z$ avec son image $j\left(\mathbb Z\right)$ par la notation $$x=\frac x 1 $$
Les élément de $\mathbb Q$ qui sont dans $\mathbb Z$ sont donc les éléments $\frac a b$ qui sont équivalent pour $\sim$ à un élement de la forme $\frac x 1$.
Définissons maintenant une addition et une multiplication sur $\mathbb Q $ par les règles suivantes :
(1) Addition :
$$\frac a b + \frac c d = \frac{ad+bc}{bd}$$
(2) Multiplication :
$$\frac{a}{b} \times \frac{c}{d} = \frac{a\times b}{c\times d} $$
Propriété 3. On a pour tous $x,y\in \mathbb Z$, $j(x+y)=j(x)+j(y)$ et $j(x\times y)=j(x)\times j(y)$.
L'addition et la multiplication définies sur $\mathbb Q$ sont donc des extensions de l'addition et de la multiplication de $\mathbb Z$.
Démonstration de la propriété 3.
(1) $j(x+y)=\frac{x+y}{1}=\frac{x\times 1 + y\times 1}{y}=\frac x 1 + \frac y 1 = j(x)+j(y)$
(2) $j(x\times y)=\frac{x\times y} 1 = \frac{x\times y}{1\times 1}=\frac x 1 \times \frac y 1 = j(x)\times j(y)$
Remarque.
(1) On voit facilement que l'addition et la multiplication ainsi définies sur $\mathbb Q$ sont commutatives.
(2) Le nombre $0=\frac 0 1$ de $\mathbb Q$ est un élément neutre pour l'addition : $\forall \frac a b \in\mathbb Q,\ \frac a b + 0 = 0+\frac a b=\frac a b $.
(3) Le nombre $1=\frac 1 1$ de $\mathbb Q$ est un élément neutre pour la multiplication : $\forall \frac a b \in \mathbb Q,\ \frac a b \times 1 = 1 \times \frac a b =\frac a b$.
Propriété 4.
(4.1) Tout élément de $\mathbb Q $ possède un inverse pour l'addition (un opposé) :
$$\forall \frac a b \in \mathbb Q,\ \exists x\in \mathbb Q, \frac a b + x=0$$
En effet, $x=\frac{-a}{b}$ convient.
(4.2) Tout élément non-nul de $\mathbb Q $ possède un inverse pour la multiplication :
$\forall \frac a b \in \mathbb Q^\star,\ \exists x\in \mathbb Q, \frac a b \times x=1$.
En effet, $x=\frac{b}{a}$ convient.
Propriété 5.
Pour tout $\frac a b,\frac c d\in\mathbb Q$, on a $\frac a b + \frac c d = \frac c d + \frac a b$ et $\frac a b \times \frac c d = \frac c d \times \frac a b$.
La démonstration est laissée au lecteur.
On dit que l'addition et la multiplication sont des opérations commutatives.
Généralement, on omet le signe $\times$ pour les multiplications : $\frac a b \frac c d =\frac a b \times \frac c d$.
Propriété 6.
(6.1.a) Associativité de l'addition. Pour tout $\frac a b,\frac {r}{s},\frac{p}{q}\in\mathbb Q$, on a
$$\left( \frac a b + \frac r s\right) + \frac p q = \frac a b + \left( \frac r s + \frac p q\right) $$
(6.1.b) Associativité de la multiplication. Pour tout $\frac a b,\frac {r}{s},\frac{p}{q}\in\mathbb Q$, on a
$$\left( \frac a b \frac r s\right) \frac p q = \frac a b \left( \frac r s \frac p q\right) $$
(6.2) Distributivité de la multiplication par rapport à l'addition. Pour tout $\frac a b,\frac {r}{s},\frac{p}{q}\in\mathbb Q$, on a
$$\frac a b \left(\frac r s + \frac p q \right)=\frac a b \frac r s + \frac a b \frac p q $$
Ces propriétés se démontrent facilement en utilisant les définitions et les propriétés des nombres entiers relatifs.
Remarques.
(1) On écrira $\frac a b + \frac r s +\frac p q $ pour désigner de manière indifférente $\left(\frac a b +\frac pq\right) + \frac r s$ ou $\frac a b + \left( \frac p q + \frac r s\right) $
(2) On écrira $\frac a b \frac r s \frac p q $ pour désigner de manière indifférente $\left(\frac a b \frac pq\right) \frac r s$ ou $\frac a b \left( \frac p q \frac r s\right) $
Ensuite
Les propriétés précédentes pour l'addition font de l'ensemble $\mathbb Q$ un groupe pour l'addition. Voir l'article [Groupes (0)].
Les propriétés précédentes pour la multiplication font de l'ensemble $\mathbb Q^\star$ un groupe pour la multiplication. Voir l'article [Groupes (0)].
Muni de l'addition et de la multiplication, l'ensemble $\mathbb Q$ est un anneau et même un corps. J'en parlerai dans un prochain article.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire