Dans ce billet, nous introduisons les groupes à l'aide de quelques exemples simples.
Définitions
Définition 1.
Soit $E$ un ensemble. Soit $\ast $ une application de $E\times E $ vers $E$, c'est-à-dire telle que $(x,y)\mapsto x\ast y $ avec $x\ast y\in E $.
Alors on dit que $\ast$ est une loi interne sur $E$.
Exemple 1. L'addition $+$ est une loi interne sur $\mathbb N$ car la somme $x+y$ de deux entiers positifs ou nuls $x$ et $y$ est un entier positif ou nul.
Exemple 2. Si $\overrightarrow u$ et $\overrightarrow v$ sont des vecteurs de l'espace, c'est-à-dire des élément de $\mathbb R^3 $, alors leur produit vectoriel $\overrightarrow u \wedge \overrightarrow v $ est un élément de $\mathbb R^3 $ défini par
$$\begin{pmatrix} u_1\\ u_2 \\ u_3 \end{pmatrix} \wedge \begin{pmatrix} v_1\\ v_2 \\ v_3 \end{pmatrix} = \begin{pmatrix} u_2v_3 -u_3v_2\\ u_3v_1-u_1v_3 \\ u_1v_2-u_2v_1 \end{pmatrix}$$
Le produit vectoriel $\wedge $ définit une loi interne sur $\mathbb R^3 $.
Définition 2.
Soit $G$ un ensemble sur lequel il existe une loi interne $\ast$ sur $G$.
$(G,\ast)$ est appelé groupe si les 3 conditions suivantes sont vérifiées :
- [existence de l'élément neutre] Il exite un élément $e$ dans $G$ tel que pour tout élément $g $ de $G$ : $e\ast g = g \ast e = g$. $e$ est appelé un élément neutre de $G$.
- [existence de l'inverse] Tout élément de $g$ posssède un inverse pour la loi $\ast $ : pour tout $g\in G$, il existe un élément $h$ tel que $gh=hg=e $
- [associativité] $\ast$ est une loi associative, c'est-à-dire : pour tous $g,h,k$ dans $G$, on a l'égalité $g(hk)=(gh)k $. On notera sans confusion possible $ghk$ ce produit.
Si de plus, - [commutativité] Pour tous $g,h$ dans $G$, on a $gh=hg$,
alors on dit que $G$ est un groupe commutatif.
Remarque. Il ne peut y avoir qu'un seul élément neutre $e$ dans un groupe.
En effet, pour tout élément neutre $e'$, on a $e'=ee' $ car $e$ est neutre et $ee'=e $ car $e'$ est neutre, donc $e=e' $.
Exemples simples
Le groupe $\mathbb Z$
$(\mathbb N,+)$ n'est pas un groupe car à part $0$ qui est l'élément neutre, aucun élément n'a d'inverse pour l'opération $+$. Attention, ici l'inverse pour $+$ signifie l'opposé.
L'axiome (1) et (3) sont vérifiés, mais pas l'axiome (2) donc $\mathbb N $ n'est pas un groupe.
$(\mathbb Z, +)$ est un groupe car maintenant tous les axiomes sont vérifiés. L'axiome (4) en fait un groupe commutatif.
On peut aussi regarder $\mathbb Z$ muni de la loi $\times $. $1$ est l'élément neutre pour la multiplication. Mais par exemple le nombre $2$ n'a pas d'inverse dans $\mathbb Z $ pour la multiplication : il n'existe pas d'entier relatif $a$ tel que $2a=1$.
Donc $(\mathbb Z,\times) $ n'est pas un groupe.
$\mathbb Q$
$\mathbb Q $ muni de la loi $+$ est un groupe commutatif.
Muni de la loi $\times$, $\mathbb Q $ n'est pas un groupe car $0$ n'a pas d'inverse.
Si l'on retire de $\mathbb Q $ le seul élément $0$ non inversible pour $\times $, on obtient l'ensemble que l'on note souvent $\mathbb Q^\ast=\{x\in \mathbb Q | x\neq 0 \}=\mathbb Q\setminus \{0\} $. Alors $(\mathbb Q^\ast,\times) $ est un groupe commutatif.
Rotations de centre $O$
Etant donné un plan orienté et un point $O$, notons $\mathcal R_O $ l'ensemble des rotations de centre $O$.
Un élément de $\mathcal R_O $ est caractérisé par un réel $\theta $ (l'angle de la rotation), on peut le noter $r_\theta $. Ainsi $\mathcal R_O=\left\{r_\theta | \theta\in\mathbb R \right\} $.
La composée de deux rotations $r_\theta $ et $r_\phi $ est la rotation : $r_\theta\circ r_\phi=r_{\theta+\phi} $ est un élément de $\mathcal R_O $ aussi égal à $r_\phi\circ r_\theta $. $\circ $ est donc une loi interne commutative.
La rotation d'angle $0$, $r_0$ est un élément neutre pour $(\mathcal R_O,\circ) $, et tout $r_\theta $, possède un inverse $r_{-\theta} $.
Enfin l'associativité de $(\mathcal R_O,\circ) $ découle de celle de $(\mathbb R,+) $
$$(r_\psi \circ r_\phi) \circ r_\theta=r_{\psi+\phi}\circ r_\theta =r_{(\psi+\phi)+\theta}=r_{\psi+(\phi+\theta)}=r_{\psi}\circ(r_{\phi+\theta})=r_{\psi}\circ(r_{\phi}\circ r_\theta) $$
On en déduit que $(\mathcal R_O,\circ) $ est un groupe commutatif.
$\mathbb U $
Notons $\mathbb U $ l'ensemble des nombres complexes de module 1.
Alors $(\mathbb U,\times) $ est un groupe commutatif.
Nous utiliseraons la propriété suivante.
Propriété A.
Si $z$ et $w$ sont des nombres complexes, alors $\left| zw \right|=|w| \times |z| $.
Ainsi si deux nombres ont pour module 1, alors leur produit est aussi de module 1.
$\times $ définit donc une loi interne sur $\mathbb U$.
Les axiomes (1), (3) et (4) qui sont vrais sur $\mathbb C $ restent vrais sur $\mathbb U $.
Montrons que l'axiome (2) est vérifié également. Pour commencer, tous les éléments $z$ de $\mathbb U $ possèdent un inverse $\frac 1 z $ dans $\mathbb C $ car le module de 0 est 0 (et seul 0 n'est pas inversible pour la multiplication dans $\mathbb C $). De plus l'inverse d'un élément de module 1 est aussi de module 1. Cela provient aussi de la propriété A avec $w=\frac 1 z$, on a en effet :
$$\left| z \times \frac 1 z\right| =|z|\times \left| \frac 1 z \right| $$
d'où $1=1\times \left| \frac 1 z \right| $, qui donne $1= \left| \frac 1 z \right|$.
L'inverse $\frac 1 z$ de $z$ est donc dans $\mathbb S^1 $ si $z$ ets dans $\mathbb S^1 $.
$z$ est inversible pour la multiplication dans $\mathbb C $ si $z\neq 0$.
On peut en déduire que $\left( \mathcal U,\times\right)$ est un groupe. C'est en fait un sous-groupe de $(\mathbb C,\times) $ (nous verrons cette notion plus tard).
Le groupe $GL_n$
On notera $GL_n$ l'ensemble des matrices $n\times n $ de déterminant non-nul. C'est le groupe linéaire. On pourra supposer dans cet article que les coeeficients des matrices sont rééls. (Nous parlerons donc du groupe linéaire réel).
Alors si $\cdot $ dénote le produit matriciel, $(GL_n ,\cdot) $ forme un groupe appelé groupe linéaire. Ce groupe n'est pas commutatif.
La démonstration de ce résultat se fait de manière analogue à la démonstration de l'exemple précédent sur $\mathbb S^1 $. On peut reprendre exactement la même démonstration en remplaçant le module par le déterminant.
En effet, on a la propriété suivante :
Propriété B.
(B1) Une matrice carrée A est inversible si son déterminant est non-nul
(B2) Si A et B sont deux matrices de tailles $n\times n $, alors
$$\det(A\cdot B)=\det(A)\times \det(B) $$
Une conséquence directe de (B2) est que $\det\left(A\cdot A^{-1}\right)=\det(A)\times \det\left(A^{-1}\right) $.
Comme $A\cdot A^{-1}=I_n$ (la matrice identité $n\times n$), et comme $\det(I_n)=1 $, on a $\det\left(A^{-1}\right)\neq 0 $ et en particulier
$$(1)\ \ \ \frac{1}{\det A}=\det\left(A^{-1}\right) $$
L'ensemble $O(n)=\left\{A\in GL_n | \det(A)=1 \textrm{ou}\ -1\right\} $ est appelé groupe orthogonale. C'est un sous-groupe de $GL_n$ pour la loi $\cdot $ autrement dit un groupe inclus dans $GL_n$ (qui est lui-même un groupe pour $\cdot$).
En effet, il suffit pour cela de vérifier que tout élément de $O(n)$ a son inverse dans $O(n)$. D'après l'égalité (1), c'est clair car 1 et -1 sont leur propres inverses.
Le groupe des bijections
L'ensemble des bijections d'un ensemble dans lui-même est un groupe. Pour l'ensemble à $n$ élément $\left\{1,2,\ldots,n\right\}$, ce groupe est l'ensemble des permutations de $n$ éléments.
Ensuite
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